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Pourquoi Construire une "Passive House"?


Il serait faux de dire que c’est en septembre dernier que Sarah Cobb et William Murray, de Construction Rocket, ont commencé la construction de la Maison Des Sources, à Abercorn, dans les cantons de l’Est. Construire une maison, ça prend du temps de réflexion, d’élaboration et de conceptualisation qui se déroule bien avant le premier jour du chantier.

Construire une maison passive, eh bien, on pourrait dire que c’est encore plus long. Il faut prendre le temps de faire certains calculs, surtout si on désire obtenir des certifications de bâtiments éco-énergétiques, comme PHIUS et LEED®, ce que nous avons choisi de faire. Il faut aussi (et surtout) se constituer une équipe de projet, accompagnée de collaborateurs pour la conception et la construction, et d’un consultant PHIUS. Et lentement mais sûrement, nous en voyons la fin arriver. C’est pourquoi nous désirons commencer à partager notre expérience.

Pourquoi construire une passive house?

Avez-vous déjà vu quelqu’un assis dans sa voiture stationnée (le moteur en marche) durant une chaude journée d’été? Il reste assis là, dans le confort de son air climatisé, alors que le moteur renvoie toute sa chaleur dans l’air déjà cuisant.

Voici pour nous une bonne analogie de la manière dont nous construisons des maisons encore à ce jour et comment cette approche contribue au malheur de notre planète qui se réchauffe petit à petit. Pendant ce temps, nos sources d’énergie (hydroélectrique, ou fossile, ou nucléaire – aussi terrible cela soit-il) ont de la difficulté à fournir à la demande. En Amérique du nord, les bâtiments consomment à eux seuls plus de 40% de toute l’énergie dépensée, en plus d’être responsables d’un tiers de notre émission de C02. Peut-être alors la question devrait-elle plutôt être : pourquoi ne pas construire une Passive House?

Pour les initiés, une Passive House (à ne pas confondre avec une maison solaire passive) est un bâtiment qui est ultra efficace énergétiquement – aux alentours de 90% plus efficace que la maison canadienne moyenne. Pour ce faire, des principes (très bien) appliqués d’étanchéité à l’air et de « super-isolation » ainsi que des fenêtres à haute performance sont utilisés. L’emploi de matériaux adéquats d’une technologie de pointe joue un rôle déterminant dans la mise en pratique de ces principes. Le résultat étant une maison dont la consommation d’énergie est quasi-neutre.

Les objectifs de performance des certifications PHI et PHIUS

Ce qu’il faut savoir à propos des certifications PHI (certification du Passive House Institute, en Allemagne − N.D.L.R.) et PHIUS (certification du Passive House Institute U.S., aux États-Unis− N.D.L.R.) est que dans les deux cas, l’objectif est le même : construire des bâtiments qui répondent à des standards de performance énergétique. Seules les méthodes d’analyse des données de performance sont différentes.

Pour qu’une habitation soit considérée comme « passive » par le Passive House Institute, elle doit comporter certaines caractéristiques : elle doit

  1. utiliser moins de 15KwH/m² par année en chauffage et climatisation

  2. utiliser moins de 120KwH/m² pour sa consommation totale d’énergie

  3. avoir une fuite d’air totale par heure de moins de 0.6 fois le volume d’air du bâtiment (ce qui est très peu, si on compare cette donnée au nouveau standard Novoclimat qui se situe à 1.5)

  4. rencontrer des critères élevés de « confort thermique » (par exemple, la température intérieure ne doit pas dépasser 25°celsius durant plus de 10% de l’année).

PHIUS aussi a des spécifications de performances requises. Cependant, l’approche est différente :

  1. elle prend en considération les différences de températures et de climat (en fonction de la région du monde dans laquelle les données sont recueillies) pour établir ses standards. Ceux-ci se trouvent donc à être mieux adaptés aux particularités de chaque climat (ainsi donc, les performances requises pour le Canada, qui connait des écarts de température de plus de 65°celsius dans une même année, ne seront pas les mêmes que ceux de l’Allemagne, là où les standards PHI sont établis, qui ne connaît des écarts que d’environ 30° celsius).

  2. la cible d’énergie totale consommée annuellement, au lieu d’être évaluée uniquement en fonction du nombre de mètres carrés du bâtiment, propose plutôt une spécification en fonction du nombre de personnes qui y résideront, afin de réduire la consommation à 6200KwH/personne/année. Cette mesure sert à « encourager les projets à être ‘mieux-dimensionnés’. De cette façon, les maisons sous-occupées auront besoin de réduire encore plus leur consommation pour rencontrer leur objectif, où de mettre à exécution des stratégies de réduction de leur demande en énergie, comme par l’inclusion de systèmes à énergies renouvelables », nous explique notre évaluateur PHIUS.

Prendre en compte l’empreinte écologique globale avec LEED®

Tant qu’à avoir fait le travail de performance énergétique, nous avons décidé de nous renseigner sur les critères de certification LEED®, pour savoir s’il nous était possible de l’obtenir. Il se trouve qu’avec un peu de réflexion et les efforts mis au bon endroit, n’importe quelle habitation neuve devrait pouvoir se qualifier. Le système LEED® tend à promouvoir la construction par le biais d’une approche globale de développement durable, à la différence de Passive House, qui se concentre uniquement sur l’enveloppe de la maison (et les systèmes internes de celle-ci).

Les critères d’évaluation LEED® sont divisés en huit catégories, qui regroupent un ensemble beaucoup plus vaste de facettes de la construction, allant de « l’innovation et les processus de conception » à « L’aménagement écologique des sites ». L’évaluation amasse un total de points qui détermine le niveau de certification (certifié, argent, or, ou platine – nous espérons obtenir la platine), il est donc possible d’obtenir moins de crédits dans certaines catégories et d’aller en chercher d’autres ailleurs, comme dans le cas de notre maison située sur le Chemin Des Sources, à Abercorn (milieu assez rural), qui n’a la possibilité d’obtenir que très peu de crédits pour le critère « Emplacement et liaison » (qui offre des points entre autres pour la proximité de transports en commun et des parcs municipaux…). En contrepartie, pour les critères concernant la consommation d’énergie et la qualité de l’air, dans notre cas le travail était déjà fait.

Nous avons cependant porté une attention particulière aux choix des matériaux (bois de charpente certifié FSC, déclin de pruche locale, liste exhaustive du bois nécessaire dans le but de réduire les pertes, portes et armoires recyclées, etc.) afin de gagner des points pour le critère « Matériaux & ressources ».

En fait, l’exercice que nous faisons en tentant d’obtenir la certification LEED® en est un que nous devrions toujours faire dans le domaine de la construction afin de protéger les écosystèmes avoisinants, de faire attention à sa production de déchets, de favoriser des matériaux et des techniques de construction durables, etc.

L’environnement ne s’en porterait que mieux!

Springhouse, la maison des sources

Notre maison est un bâtiment de deux étages à double ossature (en bois) de 26’ par 38’, avec des murs de 22" d’épais isolés à la cellulose (ce qui donne un facteur d’isolation de R69) et des fermes de 30" qui retiennent la cellulose du toit (plus de R100).

Une membrane « intelligente » fait office de pare-vapeur sur les murs intérieurs de la maison, tandis qu’à l’extérieur une membrane qui offre une grande perméabilité à la vapeur tout en étant extrêmement étanche à l’eau et à l’air est installée (pour pouvoir laisser s’échapper toute humidité qui aurait trouvé son chemin jusqu’à l’intérieur du mur). Le bon choix des membranes (et des rubans adhésifs) ainsi que leur bonne installation sont capital dans le processus d’étanchéisation à l’air.

Pour nous, cela a porté fruit puisque lors de notre premier test d’infiltrométrie effectué (avant isolation) par notre évaluateur PHIUS, nous avons obtenu une valeur de 0.16 CAH50 (changement d’air à l’heure à 50 Pascals) en dépressurisation et de 0.36 en pressurisation (rappelons que l’objectif PHI s’éleve à 0.6 ACH50!). L’évaluateur (qui fait des tests depuis 1980) n’en croyait pas ses yeux.

L’échangeur d’air que nous avons choisi pour répondre aux standards Passive House en est un à haute performance, avec un élément de géothermie (à l’aide de tuyaux remplis de glycol qui récupèrent la chaleur de la terre) pour réchauffer (ou refroidir, selon la saison) l’air entrant dans la maison.

Pour chauffer la maison, deux modules (un au rez-de-chaussée, un à l’étage) Mitsubishi Hyper-Heat (munis d’une thermopompe à haute efficacité pouvant aller récupérer la chaleur de l’air ambiant jusqu’à -27.7°C) seront apposés au mur, et l’échangeur d’air s’occupera de redistribuer l’air chaud à travers toute la maison.

Les fenêtres, quant à elles, posent un autre défi, puisque l’on sait qu’elles constituent normalement une des premières causes de fuites d’air dans les maisons. Celles dont nous avons fait l’acquisition nous proviennent d’une compagnie irlandaise qui offre des fenêtres isolées triple-verres pour les maisons passives avec un coefficient d’isolation de R-7 à R-9. Nous avons fait le test, et deux personnes face à face de chaque côté de la vitre ne s’entendent pas parler.

Si nous atteignons notre but, la maison de 1900 pieds carrés que nous construisons coûtera au maximum 200 dollars par année à chauffer. L’air ambiant sera toujours frais et sain, parce que changé fréquemment par l’échangeur d’air plutôt qu’aspiré à travers toutes les composantes du mur par les fuites d’air et la maison en elle-même sera incroyablement silencieuse grâce à la quantité d’isolant.

Il s’agit là d’un défi technique, oui, en plus de revenir plus cher à l’achat d’environ 10 à 20%. Mais les coûts en extra seront rapidement récupérés par l’économie d’énergie (énergie dont le coût ne tend pas à baisser, rappelons-le). L’attention (qui frise l’obsession!) portée à l’étanchéité à l’air et à la quantité d’isolant requis pour faire une maison passive peut sembler grotesque, mais est-ce vraiment plus aberrant que de «chauffer le dehors » – ce dehors que l’on tente désespérément de refroidir?

Dans une maison étanche et bien isolée, nous pourrions être confortables toute l’année durant et réduire notre consommation d’énergie de 90%. Ni notre portefeuille ni notre planète ne s’en plaindraient, c’est évident.

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